Emilie D
J'ai grandi en rase campagne dans les années 80 et aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours eu un crayon ou un instrument de musique dans les mains. J'aurais bien aimé vous dire que, pour combler la solitude, j'avais le nez dans les livres, parce que ça aurait fait classe ; mais la réalité c'est que j'ai surtout beaucoup regardé la télé .​​​​​​​
​​​​​​Mon premier film, je l'ai tourné avec mon frère quand j'avais 8-10 ans, mais on n'avait pas de caméra. Ballot. Alors on a rejoué jusqu'à plus soif notre histoire de cow-boys et d'indiens en prenant soin d'améliorer la mise en scène à chaque "prise". 
Je suis devenue graphiste (et parisienne) au début des années 2000. J'ai alors pu commencer à m'équiper un peu plus sérieusement et à me sentir un peu moins moins isolée. Mais j'ai continué à utiliser des bouts de ficelle et mon imagination d'enfant pour bricoler des vidéos toute seule dans mon coin.
Après quelques années à faire des logos et des mises en pages pour gagner ma vie, je me suis retrouvée à travailler aux côtés d'animateur·ices de dessins-animés, je les ai alors observé·e·s comme une petite souris et j'ai commencé à faire bouger des dessins dans mon ordi.
J'avais alors presque 40 ans et des tas de trucs à raconter. Je me suis donc lancée en 2020, en diffusant pour la première fois un film sur internet : "Juste un spectacle pour enfants", la parodie critique d'une comédie musicale familiale bourrée de stéréotypes de genres qui m'avait mise hors de moi. Et parce que j'aurais été bien incapable de dessiner des personnages évoluant sur une scène de théâtre, j'ai dû trouver des ruses. C'est donc comme ça, en rusant, que j'ai trouvé ma forme à moi : mêler des séquences dans lesquelles je parle devant une caméra et du dessin qui bouge.
Oui, je suis assez contente de l'expression "dessin qui bouge".
Pas féérique
Lancé en mars 2020, le projet «Pas féérique» – expression tirée de mon premier film – est mon terrain de jeu absolu : je peux y faire tout ce que j'aime faire en disant ce que j'ai à dire. Parce que l’intime est politique, j'explore des thématiques en lien avec l'égalité des genres en partant de ma propre histoire. 
Que nous en soyons conscient·e·s ou non, nous avons été façonné·e·s par des histoires. Celles que nous avons rencontrées dans les fictions (les livres, les films…) et dans les images du quotidien (les magazines, les publicités…) ; celles que nous nous sommes racontées entre nous et par voie de conséquence, celles que nous nous sommes racontées à nous-même. Ces récits ont eu pour effet de limiter les possibilités des enfants que nous avons été et donc des adultes que nous sommes devenu·e·s. Les films « Pas féérique » proposent de damier le pion aux histoires qu'on nous raconte, à travers le point de vue de quelqu’un qui pourrait être votre cousine, votre fille ou votre collègue.